Dans le cadre du Festival des Mots-Publiés sur le thème de la "Publication", chaque dimanche, nous vous livrons la parole d'un auteur ou d'une autrice.
Aujourd'hui, nous rencontrons Théâs, l'architecte de toute une communauté, qui vous parle de son expérience sur le web.

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Depuis combien de temps publies-tu en ligne ?
D’après mes vieilles archives, depuis 2003/2004 (ça ne me rajeunit pas…). En réalité, depuis le jour où j’ai eu la chance d’avoir internet à la maison (ne riez pas, modem 56k qui faisait une douce mélodie en composant le numéro et en occupant la ligne téléphonique familiale !) et que j’ai découvert le vaste monde des fan fictions.
C’est par-là que j’ai commencé et à l’époque, il n’y avait pas de réseaux sociaux, les moteurs de recherche étaient aussi nombreux qu’inefficaces… Alors trouver un forum où s’incruster pour échanger autour de tout ça était mission impossible (Lycos, va chercher ! vous l’avez ? Non, bon…) .
Donc un peu moins de 20 ans pour la publication en ligne !

Es-tu également lecteur de publications en ligne ? Si oui, quel pourcentage cela représente sur ta lecture en général ?
J’ai été un grand lecteur de publications en ligne, c’est vrai. Aujourd’hui, je le suis un peu moins car j’ai à la fois moins de temps, plus de choix et plus d’exigences. Tout cela combiné fait que je suis passé de 50% à peut-être 5 ou 10 % de lecture en ligne ?
Il faut dire aussi que je lisais beaucoup de fan fictions à l’époque. Aujourd’hui, je n’en lis presque plus. Le seul type de fanfic qui m’intéresse étant aussi la forme la plus rare : capable d’être dans le canon de l’œuvre originale en développant des pans manquants et respectant la mythologie de l’œuvre dont elle s’inspire.
Concernant les publications web au sens large, j’avoue avoir beaucoup de mal à y trouver mon compte, il faut dire que là aussi, mes genres de prédilections ne sont pas les plus courants (Science-fiction et Fantastique plutôt horrifique). Je trouve davantage mon compte dans les auteurs publiés et les œuvres audio comme les creepypastas.

Hormis sur L'Allée et LC, comment te sers-tu d'internet pour mettre en valeur tes publications en ligne ? (blog, forum, réseaux sociaux...)
J’ai mon propre site internet où je me suis amusé à mettre en page des petites choses sur mes projets. Loin de l’idée d’en faire un truc incontournable si tant est que cela intéresse quelqu’un, je le fais davantage pour moi, pour m’exprimer et faire sortir toutes ces choses que j’ai envie partager et de montrer.
Les réseaux sociaux sont pour moi quelque chose d’assez compliqué à appréhender. J’ai connu les débuts et je trouve que la convivialité, le respect et les bonnes ondes s’en sont rapidement échappés au profit d’une accumulation de personnes revanchardes, mauvaises et trop enclines à constamment se plaindre de tout. Et puis beaucoup s’écoutent parler… Particulièrement sur Twitter (que je fuis).
Mais j’essaie tout de même de profiter de ces outils pour partager volontiers ce que je fais, en me disant que même si une seule personne trouve cela intéressant, ce sera une occasion de plus d’échanger.
C’est vrai que je suis sans doute un peu mitigé sur tout ça, principalement parce que le potentiel social est là, mais la promesse pas tenue.

Que t'apporte la publication en ligne en tant qu'auteur ?
Un espace d’expression. Je ne suis pas acteur, alors je ne m’exprime pas sur scène. Je ne suis pas plus musicien, donc je ne m’exprime pas par la musique. Mais je peux être auteur et m’exprimer avec les mots et internet me donne la possibilité de poser mes mots et de les partager avec qui le voudra.
Je pense que c’est la possibilité encore une fois de pouvoir s’exprimer et de partager sans limites quelque chose qui me passionne et occupe mon temps des journées entières.

Qu'est-ce qui t'a poussé à créer l'Allée et Le Conteur ?
C’est une question à laquelle j’ai beaucoup répondu en plus de quinze ans. À chaque fois, je n’ai qu’une réponse : pour avoir un endroit qui me ressemble sur internet. Même à ses débuts, il y avait des conflits, des ambiances toxiques et certaines formes de rejets de l’autre que j’avais beaucoup de mal à appréhender sereinement, même quand cela ne me concernait pas.
Étrangement, créer l’Allée (à l’époque Werewolf Studios), m’a permis d’avoir un endroit où je me sentais chez moi, un endroit qui suivait ma vision d’une communauté internet tant dans l’idée que dans la forme. Sans l’Allée, je ne pense pas que je serai resté et encore présent aujourd’hui, malgré l’importance de l’écriture dans ma vie.
Pour LeConteur, l’origine est un peu différente. Nous avions l’Allée d’un côté où une petite partie des gens pouvait publier et utiliser les outils développés, mais aussi la communauté du forum qui papotait écriture. J’ai senti que le moment était venu de proposer quelque chose de nouveau, un complément à l’Allée pour permettre à notre communauté de pouvoir publier toujours dans ce même souci d’avoir un environnement le plus sain possible, très éloigné de ce que l’on pouvait retrouver ailleurs.

Est-ce qu'être en mesure de créer un outil sur mesure à tes besoins change ta manière de travailler en tant qu'auteur ?
Tout à fait. D’ailleurs, je continue toujours de développer des outils pour me faciliter la vie et le propose généralement aux autres quand cela est possible.
J’ai cette chance d’avoir aujourd’hui la double casquette de développeur et utilisateur et cela facilite les choses. Mes envies et mes idées alimentent le développeur qui donne au modeste auteur que je suis les outils adaptés pour répondre à des contraintes particulières.

Quelle charge de travail représente la gestion de ces plateformes ?
Immense. J’ai commencé pendant mes années de lycéen/étudiant, pendant lesquelles j’avais énormément de temps libre (oui, oui, on a du temps libre pendant ces périodes) alors cela ne me dérangeait pas vraiment de passer des heures et des heures à coder, pratiquer sur Photoshop...
Heureusement, j’ai pu me former grâce à internet et développé depuis des outils pour simplifier la gestion. Mais le temps se fait de plus en plus rare et les simplifications même nombreuses ne me permettent plus aujourd’hui de me mettre 100% la tête dans un projet.
C’est la raison pour laquelle je disparais parfois un peu (n’en déplaise aux mauvaises langues), parce que je suis forcé de faire des choix comme tout le monde. Et parce que vie perso et pro sont aujourd’hui mes priorités, je suis régulièrement obligé de faire un choix entre l’écriture, la participation active et le côté chronophage du développement.
Cependant, je ne regrette pas un instant le temps passé sur l’Allée, LC et maintenant LeCoinDesAT.

Qu'en retires-tu en tant que créateur et auteur ?
Que si j’en avais la possibilité financière et qu’un projet viable émergeait de tout cela, je serais sans doute à temps plein dans ce monde passionnant qu’est l’écriture.
Il y a un côté très challenge dans tout cela : pouvoir trouver des solutions à des problèmes, travailler à l’embellissement de quelque chose. Cela me fascine et c’est l’un des moteurs qui me poussent dans mes choix en tout cas.
J’ai énormément appris depuis mes débuts, et j’essaie en permanence d’aller plus loin. Parfois au détriment de ce temps d’écriture que j’envie parfois à de nombreuses personnes.

Que conseilles-tu à quelqu'un qui veut se lancer dans la publication en ligne ?
Qu’il ne faut pas hésiter. Faire les bons choix, se tromper et apprendre.
Tout cela va ensemble. Si partager ses histoires est important, cela permet aussi de s’ouvrir à d’autres personnes qu’un entourage qui ne comprend pas forcément l’attirance pour ce genre de médias, pour l’écriture en général.
La publication en ligne est une très bonne école pour apprendre à connaître sa passion, à partager et à pouvoir l’exprimer.